Résumé des journées scientifiques 2005

du Réseau de sciences cognitives d'Ile-de-France (RESCIF)

«Passage à l'acte »


La journée s'est tenue à l’École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris (ESPCI).

Le thème « Passage à l'acte » a été abordé le 11 février par des chercheurs : professeur de psychologie du développement, de psychologie sociale, spécialiste de la modélisation en neurosciences, de l'interface homme/machine, psychiatre. En outre, les activités de Cognivence, de la Fresco et les évolutions du RISC ont été présentées. L'Espace des sciences de la ville de Paris a accueilli les participants pour une présentation de ses activités par Pierre-André Legrand durant la pause café .


vendredi 11 février 2005

Roger Lécuyer

Laboratoire Cognition et développement, université René Descartes & CNRS

De l'acte de naissance à  la naissance de l'acte

Roger Lécuyer est professeur de psychologie du développement à  l'université René-Descartes-Paris 5. Spécialiste du développement cognitif du nourrisson, il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Bébés astronomes, bébés psychologues, Le développement cognitif du nourrisson, L'intelligence des bébés et, tout récemment, Le développement du nourrisson dirigé par lui.

Savoir à  partir de quand et sous quelle forme un bébé peut « passer à  l'acte » nécessite une conception de l'acte en général et des premiers actes possibles en particulier. Pendant longtemps, sous l'influence d'auteurs aussi divers que Gesell, Wallon et Piaget, l'acte a été assimilé à  l'acte sensori-moteur, les débuts de la vie post-natale s'appelant d'ailleurs la période sensori-motrice. Dans cette perspective, l'acte implique une conditions nécessaire et peut-être suffisante : la coordination vision-préhension. Ce n'est que lorsque le bébé est capable d'atteindre un objet qu'il voit qu'il peut agir. Or, pour Piaget en particulier, l'action efficace sur l'environnement est une condition nécessaire au développement de la connaissance, ce que traduit bien le titre d'un ouvrage de Wallon : De l'acte à  la pensée.

La mise en évidence de connaissances structurées (dont plusieurs exemples seront donnés) avant l'établissement de la coordination vision-préhension remet en question cet édifice théorético-causal. Dès lors deux types d'explications peuvent être fournies : ou bien la connaissance ne suppose pas nécessairement l'acte : il existe un noyau de connaissances innées ; ou bien l'acte peut être d'une nature fondamentalement différente de la sensori-motricité et on peut décrire des actes de connaissance précoces. Ces deux points de vue seront opposés.

Il reste que dans les deux cas, une contradiction apparaît entre l'inférence de connaissances précoces, sur la base de procédures expérimentales parfois discutées, et l'inaptitude tardive à  produire les actes adaptés aux situations, et que devraient permettre ces connaissances. Tel est le cas en particulier des situations de recherche d'objets. Là  aussi deux explications sont proposées : ou bien ces connaissances précoces (en particulier la permanence de l'objet) n'existent pas ou bien il y a un long chemin pour passer de la pensée à  l'acte, ou du moins à  ce type d'acte. C'est le point de vue qui sera défendu et illustré.

 


Robert-Vincent Joule

Laboratoire de psychologie sociale de l'université de Provence

La psychologie de l'engagement ou comment amener autrui à  modifier ses idées et ses comportements ?

Robert-Vincent Joule est professeur de psychologie sociale et directeur de la formation doctorale de psychologie à  l'université de Provence. Auteur, avec Jean-Léon Beauvois, de plusieurs ouvrages de référence (dont Petit traité de manipulation l'usage à  des honnêtes gens et La soumission librement consentie), il s'est spécialisé dans la théorie de l'engagement et étudie les ressorts de l'influence et de la manipulation.

Comment amener autrui à  modifier ses idées et ses comportements ?
Depuis une cinquantaine d'années, les psychologues sociaux s'intéressent à  cette question. Leurs recherches montrent que l'on peut efficacement influencer autrui sans recourir à  l'autorité, ni même à  la persuasion. L'autorité est incontestablement efficace pour peser sur les comportements. Mais l'autorité a ses limites, les comportements obtenus autoritairement ne débouchant pratiquement jamais sur les modifications d'idées, d'opinions ou de motivations susceptibles de les garantir. La persuasion, peut s'avérer très efficace pour modifier les idées que quelqu'un peut avoir sur telle ou telle question. Mais, contrairement à  l'autorité, elle ne l'est guère pour obtenir des changements de comportements. Reste un moyen : le recours aux procédures d'engagement. Au lieu de chercher à  contraindre ou à  convaincre, on s'efforcera d'obtenir des actes a priori anodins, mais qui n'en auront pas moins pour conséquence d'engager celles ou ceux qui les auront commis à  penser et à  se comporter par la suite différemment. L'intérêt de ces procédures est de conduire à  la responsabilisation des acteurs qui en arrivent ainsi à  modifier librement leurs comportements et à  intérioriser les traits ou les valeurs qui vont en assurer la pérennité. à‰videmment, ces connaissances - comme toutes connaissances - peuvent être mises au service des causes les plus nobles comme au service des causes les plus sombres. C'est dire l'enjeu éthique.


Peter Dayan



Gatsby Computational Neuroscience Unit, University College London

Optimising Choices: Neural Modeling of Reinforcement Learning

Directeur du "Gatsby Computational Neuroscience Unit" (University College London), Peter Dayan est un spécialiste de la modélisation en neurosciences. Ses intérêts se portent sur l'apprentissage, l'analyse du codage neuronal. On peut mentionner en particulier ses contributions à  l'interprétation de la neuromodulation dans le cadre de l'apprentissage par renforcement. Peter Dayan est notamment auteur (avec L. F. Abbott) du livre "Theoretical Neuroscience" (MIT Press).

http://www.gatsby.ucl.ac.uk/%7Edayan/index.html

Reinforcement learning is concerned with adaptive optimising control -- learning to choose actions that lead to desirable outcomes. It grew out of attempts to formalize behavioural data on animal learning, and now has extensive links with engineering, computer science and statistical notions of optimal control.

Recent neurophysiological and neuroimaging experiments into prediction and action learning suggest a rather simple and direct mapping of key reinforcement learning algorithms onto a neural substrate, involving the neuromodulator dopamine and its various afferent and efferent structures.

I will discuss the theoretical and empirical bases of this suggestion, along with various of the open lines of enquiry to which it points.


Guy Boy

 


European Institute of Cognitive Sciences and Engineering (EURISCO International)

Les actions à  risque

Après une formation initiale d'ingénieur Guy Boy s'est orienté vers les problèmes d'informatisation et d'interaction homme-machine. Il a également suivi des études de psychologie et séjourné au laboratoire AMES de la NASA. Il a fondé et dirigé la société Eurisco dont l'objectif est le développement de méthodes et services d'ingénierie cognitive dans les domaines aéronautique et spatial. Il est actuellement président d'Eurisco International.

Dans le domaine de l'aéronautique, les actions du pilote revêtent plus ou moins de risque. Et dans la vie de tous les jours, prenons nous des risques à  chacune de nos actions ? La question mérite une réflexion que je vous propose d'entamer. Elle en amène d'autres comme : qu'est-ce que le risque ? Comment évalue-t-on le risque ? Faut-il être toujours prudent ? Ne faut-il pas prendre des risques pour apprendre ? Quelle est la part de l'inconnu ? Quelle est la part de l'incertitude ? Il existe des situations et des systèmes dans lesquels le risque peut prendre des proportions importantes et, dans certains cas, cruciales pour la résolution de problème, et disons-le, la gestion de crise. Je distinguerai deux types de risques : les risques intentionnels et les risques événementiels. Je tenterai de montrer que les actions à  risque ne peuvent être abordées sans considérer sérieusement la notion de stabilité cognitive. Nous verrons comment et pourquoi l'erreur humaine peut être tolérée ou bloquée (résistance). Une automatisation centrée sur l'homme doit prendre en compte ces notions pour attaquer correctement la notion de conscience de la situation et du risque. Je parlerai d'une culture de la sécurité dans laquelle prévention et contrôle feraient bon ménage, en mettant fondamentalement l'accent sur l'expérience.



Daniel Zagury


Psychiatre des Hôpitaux, Centre psychiatrique du Bois de Bondy

Approche clinique des passages à  l'acte criminel

Psychiatre des hôpitaux au centre psychiatrique de Bois Bondy, Daniel Zagury est également expert auprès de la cour d'appel de Paris. à€ ce titre, il est amené à  témoigner dans des procès pour des affaires criminelles importantes (Maxime Brunerie, Patrice Alègre, etc). Ses intérêts se portent sur la clinique, la psychopathologie et la psychiatrie légale. Il est l'auteur d'articles consacrés, notamment, au parricide, au crime passionnel, aux tueurs en série.

 

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